LES PROTOTYPES

Compilation réalisée par Bernard CHARLES


1964

Le 3 Février 1964 la France reçoit ses 2 premiers moteurs Olympus pour essais statiques.
Alors qu’on totalise déjà 41 commandes, le Concorde mobilise environ 600 entreprises (250 en Angleterre et 350 en France pour un total de 50000 employés.
Rien qu’en Angleterre on dispose de 5 centres d’essais.
Le 1er Mai a lieu le 1er vol du Bac221, dérivé du prototype du supersonique Fairey Delta 2 mais équipé d’une aile ogivale d'une forme très proche de l'aile finale et d’un nez basculant vers l’avant.
Les essais seront poussés jusque Mach 1.6 sans problème majeur.
Photo d'un vol de ces 2 avions en patrouille (source Icare)

Fairey Delta 2

1-Le Fairey Delta 2


TSR 2

2-Le TSR2

Le 27 Septembre un fabuleux bombardier prend l’air en Angleterre: le TSR2 équipé de 2 moteurs Olympus 22R. (2)
Le programme TSR2 sera abandonné par le gouvernement travailliste, dirigé par Harold Wilson qui estime que le F111 américain est moins coûteux.

Cet avion est sacrifié au profit de Concorde.

 


Le 19 Novembre les anglais veulent abondonner le programme Concord.
La nouvelle annoncée à Londres et à Paris a eu l'effet d'une bombe. Un peu plus d'un mois après son arrivée au pouvoir, le gouvernement travailliste décide cette fois d'abandonner le projet Concord mais le traité de 1962 l'interdit.
Tout est remis en cause, deux ans seulement après la signature de l'accord historique entre les deux pays.
Le communiqué laconique du 10, Downing Street indique que le gouvernement Wilson, élu à une faible majorité et qui doit faire face à une grave crise économique, "n'envisage pas de poursuivre la construction et le financement de l'opération Concord qui est trop incertaine et ruineuse pour l'économie du pays".
Harold Wilson, résolu à ne pas revenir sur sa décision, considère le projet comme une opération de prestige.
Il estime que le budget s'enfle démesurément.
En fait la faiblesse de la livre Sterling pousse les anglais, sous la pression de Washington, à l'abandon des grand projets technologiques.
Le TSR 2 en a fait les frais, pour Concorde ce sera plus compliqué.



1965

Le 20 Janvier, Concord(e) est sauvé !. Après de longues semaines de suspense, le ministre de l'Aviation, Roy Jenkins, a annoncé à la Chambre des communes que la Grande-Bretagne respecterait l'accord signé le 29 novembre 1962.
Le ministre souligne que son gouvernement reste préoccupé par certains aspects financiers et économiques du projet.
Ce revirement est dû à la fermeté des Français qui menaçent Londres d'une action en justice, pour non respect des accords.
Dès le début de cette crise, Paris avait fait savoir que la France n'hésiterait pas à traîner les anglais devant les tribunaux internationaux en cas de dénonciation unilatérale de l'accord de Londres.



Les premières pièces du 001 sont usinées à l’aide de machines outils à commandes numériques, capables d'usiner des pièces très complexes à partir de simples lingots.
Les copeaux récupérés servant à fabriquer des casseroles ou des caravanes...
Ces fraiseuses (3) constituent déjà une des nombreuses innovations technologiques apportées par le programme Concorde.

Fraiseuse numérique
3-Fraiseuse numérique


Le 1er tronçon arrivant à TLS
4-Tronçon de fuselage et un moignon d’aile


Le 6 mars, le CEAT (Centre d’Essais Aéronautiques de Toulouse) reçoit un tronçon de fuselage et un moignon d’aile pour procéder à des essais statiques. (4)
Le Royal Establishment de Farnborough est lui, chargé des essais dynamiques.

La pointe avant du 001 sera quant à elle assemblée en octobre.

Le moteur 593 B (B pour Big) est mis en route pour la première fois en novembre chez Rolls Royce à Bristol.

Septembre 1965, le principe d'une répartition des tâches, au coeur même de l'accord franco-britannique, signé en novembre 1962 est respecté. (5)
Quatre grandes entreprises aéronautiques, deux françaises et deux britanniques, sont chargées de l'exécution du projet. Aux termes d'accords conclus dès 1961 entre ces sociétés et confirmés par les deux gouvernements, la mise au point du futur supersonique est en fait scindée en deux :

-La cellule par British Aircraft Corporation et Sud-Aviation.
-Le groupe propulsion par Bristol Siddeley et la Snecma.

La direction du programme Concorde est assurée par un comité responsable dont la direction est confiée alternativement, pour une période de deux ans, à la France puis à la Grande-Bretagne.
Le principe de partage égal est même appliqué aux plans d'études et de fabrication, cotés en unités métriques et en mesures anglo-saxonnes.
Les ingénieurs s'adaptant bien à cette dualité.

 

Reapartition en 1965
5-La répartition des tâches
(Cliquez sur l'image pour voir les détails)


Mirage 3B1
6-Entrainement sur Mirage IIIB, le pilote à l'arrière et le contrôleur à l'avant



1966

25 Juin, le Mirage IIIB sert de simulateur pour les futurs pilotes. (6)

Les hommes qui prendront les commandes du futur supersonique Concorde doivent tout savoir sur le comportement de l'appareil, même avant de l'avoir piloté.
L'administration n'accordera pas de certification à un avion si ses commandes de vol ne répondent pas de façon identique à celles des avions subsoniques en service.
Les responsables du projet ont fait appel à un Mirage IIIB dit à stabilité variable, dont on peut déplacer le centre de gravité et qui donne à son pilote les mêmes sensations que s'il était aux commandes du Concorde.
Un ordinateur de bord modifie les ordres transmis aux gouvernes et renvoie au pilote la sensation d'un effort artificiel, lui donnant l'impression de conduire un avion plus lourd à vitesse supersonique.
Au sol, le centre d'essais de Toulouse dispose d'un simulateur d'études LMT.
Du côté anglais Brian Trubshaw aura l'occasion quant à lui de voler sur B58 aux Etats Unis pour y effectuer des tests similaires.

 

Le 9 septembre, les moteurs Olympus 593 B sont testés en vol, (7) montés dans une soute aménagée sous le ventre d’un Vulcan, la vitesse de Mach 0.98 sera atteinte sans problème.

Les premiers assemblages sur les chaines de Toulouse et de Filton débutent le 7 Avril 1966.
A cette date on compte déjà 50 machines commandés ou en option, pour 11 compagnies.
En décembre, Aux États Unis le projet de Boeing est retenu au profit de celui de Lockheed.


7-Le banc d'essai volant des Olympus

 

Tronçon du 001 à Filton
8-Tronçon de fuselage du 001 à Filton


Les chiffres examinés par le ministre français de l'Equipement, Edgar PISANI, et le ministre britannique de l'Aviation, Fred MULLEY, lors d'une rencontre à Londres en septembre, sont à la hausse.
En 1964, Paris et Londres avaient évalué le coût du projet à 3 088 milliards de francs.
Il est désormais à 7 milliards, et ce jusqu'à la certification du Concord, prévue pour 1971.
Cette augmentation est attribuée à l'augmentation des salaires et à la décision, annoncée en 1966, d'allonger le fuselage de l'avion pour accroître sa capacité en passagers.
Ce chiffre global comprend 5,2 milliards de francs pour le développement et 1,8 milliards pour les dépenses supplémentaires prévisibles dans un projet aussi ambitieux.
Au total, les deux pays ont dépensé jusqu'à présent environ 1,3 milliards de francs.
Cependant les usines continuent de produire les premiers éléments du prototype (8)

1967

La maquette de Filton est mise à profit pour étudier l’aménagement intérieur pour 15 compagnies différentes.
Une maquette à l'échelle 1 entiérement métallique, est exposée lors du salon du Bourget en juin.

Les essais statiques de vibrations sont effectués sur le 001 à partir du mois d’août à Toulouse.
Le roll out du F-WTSS (9) a lieu le 11 Décembre à Toulouse en présence de nombreuses personnalités, dont les responsables des essais en vol, André Turcat et Brian Trubshaw.
Ce jour là les anglais acceptent le E final qui selon, eux symbolise Entente Excellence, England et Europe, ce sera donc Concorde.

Roll Out
9-Le Roll Out du Concorde 001

Le 4 Février 1968 les moteurs Olympus poussent leurs premiers rugissements sous l’aile du 001, pour des tests au sol.
Les premiers roulages débutent le 20 août sur la nouvelle piste de Blagnac spécialement construite pour Concorde.

 


sources des photos:

"Icare" tomes 164-135 : 1, 2, 3, 4,
"Chroniques de l'aviation" : 6, 7
"Celebrating Concorde" de Reginald Turnill : 8, 9
"Les cahiers de science et Vie" (numéro 9 de janvier 1992) : 5