TOUR DU MONDE 2000

(Marie Antoinette GUILLON)

Avant-propos : Je ne suis pas journaliste mais j’ai eu la chance d’avoir été invitée par ma mère à réaliser “un voyage de rêve dans un avion de rêve » et j’aime écrire les récits de voyages.
Je dédie aussi ce résumé, à trois membres de l’équipage disparu : Anne, Gilles et Hervé.


Ce jeudi 17 février 2000, un rendez-vous est fixé, à l’aérogare 2 de l’aéroport de Roissy Charles-de-Gaulle avec l’agence TMR, pour réaliser un superbe voyage : un Tour du Monde en Concorde vers les escales suivantes : Mascate – Delhi – Bangkok – Bali – Sydney – Tahiti – Ile de Pâques – Iguaçu et Rio de Janeiro. 

L’agence nous avait réservé les meilleures places dans le Concorde, soit au premier rang, les places 01C et 01D. En attendant le décollage du vol AF 4650, prévu à 9 heures 30, un verre de champagne nous est offert ainsi qu’une rose à la boutonnière.Nous volons en vitesse subsonique, c’est à dire 950 kms jusqu’au-dessus de Montpellier et à partir de là et jusqu’à Beyrouth, pendant 1 h 30, en vitesse supersonique c’est-à-dire à Mach 2 à 2000 kms/heure et 18.000 mètres d’altitude car nous sommes au-dessus de la Méditerranée. Le Concorde ne peut voler, en vitesse supersonique, qu’au-dessus des mers et des océans, à cause du « bang » du mur du son, pour éviter les nuisances au sol. Nous passons au-dessus de la chaîne de montagnes enneigées du Liban et poursuivons notre vol vers Bahreïn pour une première escale technique d’une heure après un vol de 4 heures et 5.817 kms. Notre arrivée est filmée par la télévision Bahreïnique. Continuation de notre vol vers le Sultanat d’Oman où nous atterrissons à Mascate, la capitale, vers 19 h 30, par 27 degrés.

Mascate (Sultanat d’Oman)

En 1970, l’actuel Sultan Qaabous bin Saïd al Saïd prend la place de son père et en moins de 25 ans, le Sultanat d’Oman va passer du Moyen-Age à l’An 2000. Il y avait un hôpital et trois écoles pour garçons et maintenant il y a de nombreuses écoles qui accueillent plus de 300.000 élèves, garçons et filles.
Une cinquantaine d’hôpitaux dispensent des soins gratuits aux Omanais. Notre guide explique qu’il y a 30 ans, il y avait sept voitures, appartenant principalement à la famille royale et maintenant dans le pays, il y en a plus de 1.000. L’essence coûte 3 $ pour 8 litres = 3 €uros.La population est de deux millions d’habitants dont 41.000 à Mascate. Sur l’ancienne route de l’encens, Oman était au 17ème siècle sous le pouvoir portugais, de nombreux châteaux-forts témoignent de cette époque.Dîner de bienvenue et présentation de l’équipe TMR France, que nous apprécions beaucoup et présentation de l’équipage d’Air France du Concorde : le Commandant de Bord, Charles Catania, qui nous propose d’aller dans le cockpit pour un décollage, le Co-Pilote, Eric Celérier, le mécanicien-naviguant, Gilles Jardinaud, le chef de cabine, Alain Verschuère, la souriante hôtesse, Anne, le steward, Denis et les autres membres de l’équipage qui travaillaient à l’arrière de l’avion : Virginie, Muriel et Hervé.
Lever très matinal, à 5 h 30, pour aller prendre « notre » Concorde à 7 heures 50. A cause du décalage horaire, nous avons reçu notre déjeuner de « Midi » à 8 h 30 ! De magnifiques menus nous sont proposés avec caviar ou foie gras, plats excellents, vins fins de France et le tout arrosé de champagne et toujours une nouvelle fleur à la boutonnière. Après un vol de 1 h 55, en vitesse subsonique, nous atterrissons à Delhi.

 


 
Menu du Concorde.

Delhi (Inde)

Capitale de l’Inde, immense pays de 936 millions d’habitants. Visite de la ville : le Fort Rouge construit par Shah Jahan, 5ème Grand Moghol, au bord de la Yamunâ, bâti sur le modèle d’Agra, en grès rouge, protégé par des hauts murs de 20 mètres datant de 1640, le Tombeau de Safdarjung qui inspira la construction du superbe Taj Mahal, arrêt devant le Mémorial où repose le Mahatma Gandhi, l’apôtre de la paix. Passage devant la résidence présidentielle, le Palais Rashtrapati Bhavan, qui fut la résidence du dernier Vice-Roi des Indes, Lord Mountbatten.La magie de l’Inde, ce sont les gens, les couleurs, les saris, l’odeur des épices, les palais et les temples anciens, le souvenir du passé et le temps présent.Nous partons pour Bangkok où nous arriverons, après un vol très agréable de 2 h 50 et 3.011 kms, en longeant la chaîne de l’Himalaya. 

Bangkok (Thaïlande)

Les colliers d’orchidées nous sont offerts à l’arrivée. Quelle chaleur dans cette ville : 35 à 40 degrés ! Il y a 58 millions d’habitants en Thaïlande dont 7 millions habitent la capitale.Visite de l’ancien Palais Royal et le temple du Bouddha d’Emeraude qui abrite la statue la plus vénérée du royaume, d’un seul bloc de jaspe datant du 15ème siècle.La Thaïlande est le pays du sourire, l’amabilité des gens, les temples superbes et l’atmosphère agréable des rues font de ce pays une destination agréable. La capitale fut fondée en 1782 par le roi Rama Ier et surnommée par la population « Krung Thep » (Cité des Anges). La ville est située sur le fleuve Chao Phraya.La journée se termine par un  spectacle de danses illuminées par un magnifique feu d’artifice.Avant le voyage, le commandant de bord nous avait écrit, pour nous dire qu’il ne fallait pas dépasser les 20 kgs réglementaires pour les valises, car pour aller plus vite qu’une balle de fusil, Concorde a nécessairement un profil aérodynamique et un fuselage étroit et les soutes ont donc un volume restreint. Il était content car il avait une moyenne de 19,5 kgs par passager.


 L’Ancien Palais Royal de Bangkok. 

Bali (Indonésie)

Après avoir franchit la ligne de l’Equateur, nous arrivons sur l’Ile de Bali. C’est une île verte et fertile, la culture du riz se fait en terrasses. C’est en 1597 que les premiers marins hollandais accostèrent sur « l’Ile des Epices ».L’île compte 2,5 millions d’habitants pour une superficie de 5.500 kms. Nous reprenons notre bel avion, à destination de l’Australie où nous ferons une escale technique à Darwin, ville située au Nord du Continent Australien. Pendant l’escale, le directeur de croisière vient m’annoncer, que ce serait mon tour d’aller dans le cockpit pour assister au décollage. 

 Plan de vol du trajet Bali-Darwin-Sydney.     
  Au décollage !

                                                                                            

 Dans le cockpit du Concorde

Alain vient me chercher et je me retrouve assise juste derrière le Commandant de Bord, attachée par une double ceinture au siège. Conversation entre pilote, co-pilote et mécanicien de bord et la tour de contrôle. Nous nous préparons à décoller, les moteurs mis à plein régime, à 350 kms/heure, on aperçoit la piste avec la ligne blanche au milieu. Nous roulons de plus en plus vite, calés au fond de son fauteuil et nous nous envolons ! La vitesse de croisière en subsonique est de 950 kms/heure et 10.000 mètres d’altitude. Vingt minutes après le décollage et après avoir reçu le « verre de l’amitié » dans le cockpit (un verre d’eau plate), nous passons à la vitesse supersonique à Mach 2 et sans ressentir le moins choc. Mach, c’est le nom d’un physicien autrichien, le machmètre est un compteur de vitesse en rapport entre la vitesse de l’avion et la vitesse du son dans l’air qui l’entoure.  


Dessin du poste de pilotage réalisé par le co-pilote Eric Célérier.

Au départ, le constructeur de Concorde avait voulu faire un avion sans fenêtre mais pour les passagers, cela aurait été un peu frustrant alors on a fait de toutes petites fenêtres (10 x 15 cm) car s’il devait se casser une fenêtre en cours de vol, la dépressurisation serait moins forte qu’avec une fenêtre d’avion normale car à cette altitude de 18 kms, notre sang bouillonnerait dans notre corps. C’est tellement extraordinaire d’avoir pu être dans le poste de pilotage du Concorde pour un décollage, cela m’a fort impressionnée. Tous les vols, lors de ce tour du monde, étaient impeccables, c’est un plaisir de voyager dans le Concorde. Le Concorde mesure 62,10 mètres de long pour une envergure, avec ses ailes Delta, de 25,56 mètres, la largeur de la cabine est 2,87 mètres. Le nez bascule pour permettre au pilote de voir la piste au décollage et à l’atterrissage.

Sydney (Australie)

L’arrivée dans la belle ville de Sydney a lieu, après un vol de 5.122 kms et 4 heures de vol.
La capitale de l’Australie est Canberra située à 300 kms. Il y a 18 millions d’habitants en Australie dont 3,5 millions à Sydney.Premier point de vue depuis le Jardin Botanique d’où l’on peut admirer le célèbre opéra avec son toit semblable à des voiles blanches gonflées par le vent, devant le Harbour Bridge.
C’est une ville très agréable, beaucoup de parcs, très propre et qui donne envie d’y habiter. Visite de l’opéra, l’architecture futuriste de l’intérieur est en  béton brut et les murs sont recouverts d’un bois brun et dur provenant du Nord de la Nouvelle-Galles du Sud Australien. En empruntant le monorail aérien qui traverse une partie de la ville, nous arrivons à l’aquarium de Sydney, un des plus beau et grand du monde.
Nous passons dans un tunnel transparent, dans l’aquarium où nous admirons des requins et des raies-manta d’une envergure de 2,50 mètres.
Pour rejoindre l’aéroport, nous prenons un long tunnel de 12 kms qui traverse toute la ville. Nous quittons Sydney, le lundi 28 février à 7 h 20 et nous atterrissons à Tahiti, le dimanche 27 février ! dans l’après-midi, car c’est aujourd’hui que nous passons la ligne de changement de date. C’est assez incroyable cette sensation de revivre deux fois le même jour.
Escale technique à Auckland, en Nouvelle-Zélande, où un officier du Ministère de la Santé vient désinfecter le Concorde, afin de permettre aux passagers de descendre en transit.

Tahiti (Polynésie Française)

A l’arrivée à Papeete, par 31 degrés, nous recevons des colliers de fleurs en guise de bienvenue et une fleur de tiaré que l’on met derrière l’oreille ; à gauche – cœur pris et à droite – cœur libre.
Tahiti est située à 19.000 kms de la France. L’origine de Papeete ; hier, les habitants venaient chercher l’eau au village dans des paniers d’où son nom qui veut  littéralement dire « panier à eau ». Nous faisons la « Une » du journal « Les Nouvelles de Tahiti » car il annonce : « le retour du Concorde » en disant : « que durant le week-end, le supersonique Concorde a posé ses ailes à l’aéroport de Tahiti, pour son premier passage de l’année 2000 en amenant avec lui 90 passagers réalisant un « tour du monde » dans l’avion le plus rapide du monde ». Tahiti est une île née d’éruptions volcaniques il y a plus de 2 millions d’années, elle est formée de deux îles qui forment un huit à l’intérieur d’un même lagon, ses montagnes atteignent plus de 2.000 mètres d’altitude. Sa végétation est luxuriante et variée : bananiers, frangipaniers, hibiscus, cocotiers, etc…
Quel bonheur d’être ici, dans cette île de rêve, c’est l’été éternel.

Rapa-Nui (Ile de Pâques)

En provenance de Tahiti et après un agréable vol supersonique de 2 heures 15, nous arrivons à l’Ile de Pâques.  

          Atterrissage à l’Ile de Pâques. 

Cette photo est impressionnante car on voit l’Océan Pacifique, au Nord et Sud, de la piste d’atterrissage !
La piste de l’aéroport de Rapa-Nui a été construite sur la largeur la plus étroite de l’île, soit 3 kms 400. Elle peut également servir de piste de secours pour la Nasa, au cas où la navette spatiale devrait atterrir, au retour d’une mission dans l’espace. Cette île est la plus éloignée des autres terres habitées comme Tahiti à 4.050 kms et le Chili à 3.700 kms.
Nous sommes vraiment au bout du monde, il y a deux milles habitants sur l’île. L’amiral hollandais Roggeveen fut le premier européen à débarquer sur l’île, le dimanche de Pâques d’où son nom actuel.Lors de la découverte de l’île de Pâques pour aller voir les célèbres Moaïs, dont certains sont renversés, face contre terre, la guide explique : « l’orbite de l’œil avait un œil en corail.
La croyance était que le pouvoir se transmettait par le regard donc les statues tournaient le dos à la mer. Vous penserez aux gens qui se levaient le matin et qui avaient une rangée de statues qui  les regardaient. Vous pensez bien qu’à la fin du 17ème siècle, le peuple, mal alimenté, avec des chefs un peu tyranniques et dans la révolte, ces gens-là, la première chose qu’ils ont fait, ils ont enlevé les yeux de corail et renversé les statues ».
Visite du volcan Rano Raraku où, sur ses pentes se trouvent l’atelier abandonné où l’on sculptait les statues. Certains moaïs sont encore couchés sur le dos et d’autres, par centaines où seulement la tête et les épaules dépassent de la terre volcanique. Impressionnant !  

Les Moaïs de l’Ile de Pâques.  
   Le Concorde à Rapa-Nui.

Nous retournons vers l’aéroport où notre bel avion, tout seul sur la piste, attend notre arrivée.Nous effectuerons aujourd’hui notre vol en Concorde le plus long soit 5.602 kms de Rapa-Nui aux Chutes d’Iguaçu au Brésil. Le Concorde a une autonomie de vol de 6.500 kms maximum.
Notre vol sera de 1 h 42 en supersonique et de 2 h 07 en vol subsonique soit 3 h 40, en passant au-dessus de la Cordillère des Andes enneigée.

Iguaçu (Brésil)

Les Chutes d’Iguaçu (Grandes Eaux) sont situées sur trois pays : le Brésil, l’Argentine et le Paraguay. Promenade près des chutes argentines, par une chaleur humide de 35 degrés !
Les 350 chutes magnifiques, dans une végétation luxuriante, s’étalent sur plusieurs kilomètres. Nous reprenons le bel oiseau blanc pour un petit vol d’1 h 15 pour Rio de Janeiro.

Rio de Janeiro (Brésil)

Le Brésil compte 162 millions d’habitants, 10 millions habitent Rio dont deux millions dans les favelas, sorte de bidonvilles établis sur les pentes des montagnes.Découverte de Rio, la « Cidade Maravilhosa », avec le Pain de Sucre qui domine la célèbre plage de Copacabana, le Corcovado avec le Christ Rédempteur qui surplombe la ville, la statue mesure 30 mètres de haut et l’envergure des bras ouverts est de 28 mètres pour un poids de 1.145 tonnes.
Les Portugais colonisèrent le Brésil au 16ème siècle. Croyant  découvrir l’embouchure d’un fleuve, un premier janvier, ils baptisèrent l’endroit « Fleuve de Janvier » (Rio de Janeiro). A cet endroit, surplombant la baie de Guanabara, se trouve le Musée d’Art Moderne dessiné par l’architecte brésilien Niemeyer, le bâtiment ressemble à une soucoupe volante, ce célèbre architecte a dessiné la capitale Brasilia en 1960 et le Sambodrome.  


L’ambiance au Carnaval de Rio !

Carnaval de Rio

Quand c’est le Carnaval, tout le Brésil danse ! Nous allons assister au défilé des écoles de samba, qui défileront dans le Sambodrome, grande allée de 700 mètres, bordée de gradins en béton, aux sons endiablants et bruyants de la musique brésilienne et tout le public danse.Les somptueux défilés des écoles de samba entourent les imposants chars, de la taille d’une maison, une école comporte 4.000 personnes, elle met 1 h 30 pour défiler et il y a sept écoles par soirée.Le thème du Carnaval 2000 était le « 500ème anniversaire de la découverte du Brésil par les Portugais, le 22 avril 1500 ».

Rio - Paris

Le mardi 7 mars, décollage du Concorde à destination de Dakar pour une escale technique puis continuation du vol vers Paris que nous atteindrons après un vol de 9.764 kms dont 3 h 80 en vitesse supersonique et 1 h 25 en vitesse subsonique. En regagnant la France, nous apercevons un superbe coucher de soleil, au large du Portugal, à 18.000 mètres à Mach 2.  Le Concorde a consommé, lors de ce superbe voyage, 660 tonnes de fuel équivalant à 850.000 litres de carburant. Sur la photo suivante, nous voyons notre sympathique équipage de Concorde.


Muriel, Hervé, Virginie, Denis, Anne,
Gilles, le Commandant de Bord Charles Catania, Eric

 


Au-dessus du Portugal     

 

Atterrissage à 21 h 25 à Roissy.
Applaudissements et dernier message de la jolie Anne :« Bienvenue à l’aéroport Charles-de-Gaulle, il est 21 heures et 20 minutes, la température extérieure est de 13 degrés. Veuillez maintenir votre ceinture attachée jusqu’à l’extinction de la consigne lumineuse. Nous espérons que votre voyage a été agréable et nous vous souhaitons une excellente soirée. Nous vous remercions d’avoir choisi notre compagnie et espérons avoir le plaisir de vous accueillir prochainement sur les lignes d’Air France et tout particulièrement à bord de Concorde ».
Ensuite, le message du Commandant de Bord, Charles Catania : « Après notre boucle autour du monde et au nom de tout notre équipage, je voudrais vous dire que nous avons passé trois excellentes semaines et nous vous souhaitons un bon retour chez vous et peut-être  à bientôt chez TMR ou sur les voies d’Air France ».

Je tiens, ainsi que ma mère, à remercier tout l’équipage et l’accompagnement TMR pour son organisation parfaite du voyage et pour l’ambiance agréable dans laquelle nous avons vécu ce « voyage de rêve dans un avion de rêve ».
Marie-Antoinette (guillon@tiscalinet.be)
(Illustrations et photos : Agence TMR France, Air France, Marie-Antoinette Guillon, Charles Catania).